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Entretien avec Daniel Auteuil, par Pierre Gaffié (1985, Toulouse)

Le confinement m'a amené à me penser sur un passé d'animateur de radio libre (libre comme le statut de la radio et libre comme les questions). Et voici la première partie d'une rencontre avec Daniel Auteuil. A l'époque, "Jean de Florette" n'était pas sorti et les plaques tectoniques de la carrière de ce comédien n'avaient pas encore changé... Pierre Gaffié.


Daniel Auteuil: je revendique totalement le faite d’être un interprète. Je ne pense pas faire de mise en scène au cinéma ça ne m’intéresse pas , j’ai trop de plaisir à à interpréter c’est-à-dire que quand je joue au cinéma ou quand je chante je recréer vraiment quelque chose, c’est ma forme de création c’est de réinventer ce que les autres font.



Comment as-tu connu Detressan ? Le contact s’est fait comment ?


Le contact s’est fait par l’intermédiaire de Jean Jacques Souplet qui est mon directeur artistique, c’est un mec que je connais depuis 15 ans aussi, depuis l’époque où je jouais dans la comédie musicale : Gospel.

À cette Époque c’était le directeur artistique de Dave. Et régulièrement je lui disais que j’aimerais bien chanter et c’est lui qui m’a présenté Renaud après que j’ai un peu merdoyer en écoutant des chansons qui me plaisait mais qui n’allait pas me révéler. Alors que la rencontre avec Renaud a été très révélatrice.



Écoutons ce 45, ce qu’on appelle un 45 tours efficace il y a de la mélodie y’a un rif.


Oui si tu veux oui.


Daniel Auteuil premier flash spécial en direct...


* lancement de la musique *




Est ce que tu avais honnêtement une cible pour ce titre « Que la vie me pardonne » ?


Non aucune cible, encore une fois je l’ai fait pour l’envie et ensuite pour le plaisir le reste ne me regarde pas, je ne dis pas qu’il m’intéresse pas mais je suis de très près la carrière de ce disque, je demande si il passe à la radio car j’ai pas trop le temps d’écouter la radio sauf dans mon automobile de temps en temps, mais je suis là carrière du disque, mais je trouve déjà miraculeux que ça passe à la radio. Ce que je veux dire c’est que la première fois que je me suis vu à l’écran il y a 15 ans ça a été une révolution pour moi de se voir ailleurs que dans une glace et ce n’est pas pareil.

Et là tout d’un coup on est dans un taxi, puis le mec met la radio et on s’entend. Ça fait bizarre, je veux dire que je n’arrive pas malgré le temps, malgré mon boulot, malgré tout ce que je fais à perdre une certaine innocence des choses. Et ça me fait vachement plaisir, tout bêtement.



Cette chanson, il y’a un mot qui revient dedans c’est « DÉSINVOLTE », moi je trouve que c’est le mot qui te caractérise le plus lorsqu’on te voit passer à la télé, on t’as vu chanter, et j’ai trouvé que tu chantais toujours d’une manière comme l’acteur Daniel Auteuil, d’une manière plus que décontractée plutôt désinvolte. Est-ce que c’est ta manière d’être ou alors c’est un look que tu te donne ?


Non, c’est ma manière d’être je n’arrive pas à prendre les choses, les gens au sérieux je n’y arrive pas. Je veux dire je prend mon boulot au sérieux, mais il y’a un décalage, je ne parle pas de dérision. Mais j’ai un recul terrifiant par rapport à pleins choses et je suis très malheureusement parfois trop lucide. Donc j’ai du mal quelque part à prendre les choses gravement. Et si il se dégage une certaine désinvolture ce qui ne veut pas dire que je me désintéresse de ce que je fais au contraire, c’est le poids que je donne au choses c’est à dire que je fais quand même les choses.



Tu te sens progresser vers quoi toi ? Parce que un acteur quand ça prend de la bouteille cela commence à devenir soit une gueule soit un acteur de composition.


Et bien c’est bizarre parce que je sais vers quoi je veux aller puisque le prochain film que je veux faire est un rôle de composition. C’est à dire que je suis passé par tous les stades, j’ai débuté dans des films comme « La Nuit de Saint-Germain-des-Prés » où j’avais un rôle dramatique comme l’amour violé avec Yannick Bellon. Des seconds rôles, des petits rôles et puis un jour j’ai fait un rôle comique dans un film qui s’appelle « Les Sous-doués » , un film qui a eu un énorme triomphe, un film de Zidi. Et je suis devenu un acteur populaire du jour au lendemain, j’ai eu une image, une étiquette et pendant quelques années j’ai fait des films comme ça. Puis j’en ai eu assez, et je me suis servi de la mode du cinéma policier comme transition j’ai fait des polars et je suis devenu un acteur de film policier puis j’en ai fait un ou deux de trop et puis on avait oublié cette image là.



De trop ? Quel film de trop ?


Quel film de trop, je veux dire par-là que par exemple un film qui finalement est très bien c’est « L’INDIC » c’était la première fois qu’un mec, c’est Serge Leroy d’ailleurs, me faisait confiance pour un truc différent. Et c’est un film qui est sorti un an après « LA VALENCE » je crois, le scénario était terminé avant pour des raisons x on l’a fait après c’est vrai que ça faisait un peu resucé mais bon c’est une histoire différente. Et avec le temps, c’est un film que j’ai revu il y a pas longtemps sur magnétoscope et c’est un film qui est bien .



C’est quoi les films de trop alors ?


Le films de trop je dirais « L’ARBALÈTE » mais je n’y suis pour rien je sais pas je vais m’excuser mais « L’INDIC » il y’avait une vraie originalité un vrai climat. « LES FAUVES » est un film raté, mais est un film très personnel de Jean Louis Daniel, mais raté bon. Alors que « L’ARBALÈTE » finalement est un film qui est inspiré de pleins de films, c’est un film « coup » c’est un coup quoi, c’est à dire qu’on a pris un peu de chaque films. Quand je dis « on » c’est le metteur en scène et l’auteur. Moi j’ai fait l’acteur, mais c’était un film à l’arrivée efficace bien réalisé qui a finalement pas si mal marché, mais qui n’avait pas sa propre personnalité. Et en ce sens là que je dis que c’est un film de trop parce que même si jusqu’à présent je faisais des films qu’on aimait ou qu’on aimait pas ils étaient tous sincères et je doute que celui-ci l’était.



Le tournant ça a quand même été « LES FAUVES » on a senti un Daniel Auteuil complètement différent des rôles précédent, du premier Molinaro, puis des comédies.


Le tournant n’a pas été fait sur un plan de carrière parce que le film n’a pas marché donc il faut savoir que si on veut continuer dans ce qu’on veut faire il faut que certaines choses suivent. Mais dans la mesure où pour la première fois je me suis vraiment investi très fort dans un personnage différent et ou c’est la première fois que je commençais à donner plus que du métier et je commençais à donner un peu de l’âme.

J’ai commencé à ressentir ce genre de douleur tout de suite car faire ce genre de film c’est assez douloureux. Et j’ai commencé à m’investir à partir de ce film là, ce film m’a servi à savoir m’investir mieux dans les films.



Je me demande si tu n’est pas entrain de devenir petit à petit, tu le prend comme tu veux, le De Niro français.


Je le prend très bien. L’éloge est fort mais rien ne permet pour l’instant, à part ta gentillesse et peut être ta prévoyance et ta clairvoyance peut être que tu es devin, mais pour l’instant rien ne permet de l’affirmer officiellement. Disons qu’entre toi et moi c’est ce que je souhaite oui, mais à ma façon bien sur, il est pas question de faire une copie de De Niro . Il est question d’aborder ses grands rôles avec la même force. Je veux dire que il faut trouver les rôles pour arriver à ça c’est pas une question d’acteurs c’est une question de rôle, de film, de metteur en scène. Bien souvent on fait ou on nous dit de faire, on a effectivement le choix dans la quantité mais pas forcément dans la qualité poil au nez.


Je disais ça aussi parce que je sais que tu aimes bien Robert De Niro.


Je ne le connais pas du tout mais c’est un mec qui me fascine. Il me fascine parce que c’est peut être à cause de la langue, je veux dire du langage. C’est le seul acteur dont je n’arrive pas à voir comment il fait, je n’y arrive pas. Chaque fois que je vois un film de lui je ne sais pas comment il fait c’est ça qui me fascine chez les grand acteurs. C’est que des mecs débarquent et t’amène dans le truc, tu vois plus ou est la part de réalité ou de fiction. C’est très fort mais encore une fois parce que ils ont vraiment la possibilité de s’investir, ils ont les rôles qu’il faut.



En France on a pas de quoi faire des rôles aussi fort ?


Moi ça y’est je vais avoir, je vais avoir je vais le faire.



On en parle juste après si tu veux bien du prochain disque , parce qu’il faut ménager un certain suspense.

On va écouter Renaud Detressan maintenant, tu peux nous en dire quelques mots ? Parce que je pense qu’il est déjà venu plusieurs fois dans les studio.


Oui j’ai vu la photo vous n’avez pas la mienne (rires) .



Tu nous en parle de manière plus intime.


Un mot qui fait fuir maintenant mais c’est un vrai poète, c’est un mot qui fait peur mais c’est plus que ça, c’est un musicien on va remplacer poète par musicien. C’est un vrai musicien c’est un type qui a complètement le sens des mots, le sens de la musique, et une sensibilité et en même temps une force énorme, et il est à l’écoute des autres. Je trouve ça fantastique mais le mec prend le temps d’écouter. D’écouter mes problèmes je lui raconte ma vie et puis il en fait des chansons. C’est un mec que j’aime beaucoup on l’aura compris.




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